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Le VIIe FIRA à Athènes
D'Odette Drapeau


Pour ce VIIe F.I.R.A., c’est à Athènes, la capitale hellénique, que nous nous sommes retrouvés pour échanger des idées, des expériences avec nos collègues et vivre de grands moments autour de notre passion commune, la reliure.

Invités à cet événement culturel autour du livre relié, nous étions nombreux, venus des quatre coins du monde, pour confirmer que la reliure est non seulement un art majeur mais également une passion partagée par des artistes, des bibliophiles, des restaurateurs, des critiques d’art, des collectionneurs, des bibliothécaires, des historiens d’art et un large public qui aime et estime le livre, le beau livre et la reliure d’art.

Au programme figuraient des conférences données par d’éminentes personnalités du monde du livre, l’exposition de plus de cent soixante-dix reliures dans la magnifique salle du Centre Culturel Municipal Melina et une exposition remarquable de la collection de reliures rares de la Bibliothèque Gennadios, une grande exposition qui a permis le dialogue entre la tradition grecque et le monde contemporain.

À tout seigneur tout honneur, je tiens à souligner ici le travail des relieurs grecs. Trente sept relieurs qui démontrent avec vigueur que la reliure d’art est bien vivante dans ce pays. Ils ont reçu leur formation à l’étranger, en France, en Allemagne, en Belgique, en Angleterre ou bien chez eux dans des ateliers, un peu comme cela s’observe ici au Québec. Ils sont fortement influencés par leur histoire et on observe une influence importante de l’art byzantin.Cela ne les empêche pas de réaliser des œuvres contemporaines, sobres, épurées et d’une grande rigueur. Plusieurs d’entre eux sont des artistes qui réalisent l’œuvre au complet (texte, image et reliure). Je signalerai ici la reliure de Sotirios Koutsiaftis, président de l’ARA Grèce, reliure qui m’a émue par sa simplicité et son équilibre.

Le Canada était également bien représenté par quinze relieurs. Quinze reliures qui démontrent une maturité et une maîtrise dans la technique. La créativité et aussi la recherche de nouveaux matériaux ont été remarqués. Cela nous conforte dans notre volonté de continuer à travailler et à participer nombreux aux événements internationaux. La France, la Belgique, l’Allemagne, le Japon, l’Estonie, la République Tchèque, l’Italie, le Portugal, l’Espagne, la Finlande, la Suède étaient présents à cette fête du livre. Un magnifique catalogue est disponible qui décrit chacune des reliures et son histoire.

Au Centre Culturel Municipal Melina, les reliures exposées étaient mises en valeur, l’espace réparti dans deux salles spacieuses était bien éclairé et permettait une circulation facile et agréable. La modernité côtoyait le classicisme tout en gardant une harmonie certaine, témoin d’une évolution dans le temps.

À la Bibliothèque Gennadios, une remarquable exposition, organisée par Mme Vangelia Tzanetatou, a réuni soixante-seize livres reliés des XVe, XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, judicieusement choisis afin de montrer une variété de styles qui caractérisent la collection Genna dios. Mme Tzanetatou, conservatrice de l’exposition, a voulu également mettre en valeur certains détails de la reliure en réalisant des dessins graphiques révélant l’aspect technique de certaines structures. Ces dessins, admirablement réalisés et également illustrés par des photos, révélaient des détails particuliers (gardes intérieures, tranchefiles etc).

La Bibliothèque Gennadios a été fondée en 1926 et elle comprenait à l’origine vingt-cinq mille livres, archives et manuscrits. Depuis ce temps, elle a été enrichie par plus de quatre-vingt mille livres. C’est une source de référence pour les chercheurs en étude byzantine, ottomane et grecque moderne aussi bien que pour des études en art, en histoire, en ethnographie, en histoire des Balkans et de la Méditerranée. Située au cœur d’Athènes et entourée d’un magnifique jardin, cette bibliothèque offre de nombreux services tels que : une salle de lecture de livres rares, un auditorium, un laboratoire de conservation, une salle informatique et des services pour le personnel. Cette exposition a été pour moi un grand moment du forum et une excellente occasion de parcourir les beaux moments de l’histoire de la reliure, de ses styles et de son évolution à travers les siècles.

Parmi les conférenciers invités Marie-Ange Doizy, vous le devinerez, a parlé de marbrure et Florent Rousseau, qui a remplacé au pied levé Anna Ruiz Larrea d’Espagne, a tracé un tableau historique des influences et de l’évolution de la reliure contemporaine. Il y avait également Dionissis Valassis qui a parlé de l’histoire de la reliure grecque et Constantinos Staikos qui a parlé des bibliothèques des érudits grecs durant la Renaissance Italienne. Enfin, Monsieur John Lawrence Sharpe III, professeur et conservateur à l’Université Duke en Caroline du Nord, a parlé des origines du livre byzantin : le fondement copte des structures, format et matériaux. Monsieur Sharpe est un éminent spécialiste de l’histoire de la reliure, sa conférence était riche en détails et démontrait bien sa passion pour tout ce qui a trait à la reliure et tout particulièrement à la reliure copte. Il a été mon guide avec Vangelia Tzane-tatou au musée Gennadios. Un vrai bonheur de visiter une exposition avec de tels guides.

Il aurait fallu quelques semaines pour explorer superficiellement tous les sites et musées de ce pays, de cette civilisation riche de tant d’histoire. L’ARA Grèce avait choisi de nous faire découvrir quelques-uns de ses sites parmi les plus reconnus. Nous avons eu le privilège d’avoir un guide exceptionnel qui savait enrichir nos visites de ses commentaires éclairés. L’Acropole et le Musée de l’Acropole étaient sûrement incontournables quoique à Athènes l’Acropole, qui domine le paysage de la ville, est omniprésente. Mais d’y poser les pieds et de l’explorer complètement est une expérience unique. À Athènes également, le musée byzantin et le musée de l’art cycladique nous plongent au cœur de l’histoire. Et par un jour ensoleillé et doux, la visite à Delphes complétait bien ce voyage dans le temps et l’histoire. Nous avons terminé les visites au monastère d’Ossios Loukas et là, dans une ambiance de recueillement, à l’heure du coucher du soleil, nous avons tous compris pourquoi le livre était le centre du monde et de l’âme humaine. Les visites culturelles du VIIe F.I.R.A. étaient bien documentées et appréciées par les participants.

Nous étions trois représentantes du Québec à ce Forum et je dois signaler particulièrement la présence de Maria Sotériades, originaire d’Athènes, qui a contribué au montage de l’exposition et à la traduction de nombreux textes. Laurence Duffar et moi-même étions des participantes attentives et réceptives. Nous sommes revenues d’Athènes, convaincues que la reliure est un art majeur et qu’il survivra au temps.

Nous nous devons de participer aux expositions organisées autour du livre et de la reliure. Il est aussi important d’adhérer aux associations reliées au livre. Des bénévoles se dévouent et travaillent sans relâche à organiser des événements et à faire connaître la reliure. C’est à cette condition que notre métier sera reconnu et qu’il survivra au temps.